Ma Coupe du Monde (Partie 2)

Ma coupe du Monde (2e partie)

¼ FINALE :

MVL – ARONIAN (2758) 2.5-1.5

Dans la première partie avec les noirs, je savais dans quoi je m’embarquais quand je suis rentré dans cette ligne de la Grünfeld 5.Fg5. Une position un petit peu difficile à défendre où je vais devoir trouver un ou deux coups précis pour égaliser complètement ; ce qui a été le cas après 25…f5! (nulle, 44 coups).

Aronian-Mvl, ¼ finale aller.
Aronian-Mvl, ¼ finale aller.
¼ de finale contre Aronian, un classique (Photo : Fide).
¼ de finale contre Aronian, un classique (Photo : Fide).

Dans la deuxième partie, j’ai amélioré la variante de l’Italienne jouée quelques jours plus tôt contre Jakovenko, avec 15.Ce4 au lieu de 15.De4.

Mvl-Aronian, ¼ finale retour.
Mvl-Aronian, ¼ finale retour.

Mais j’ai vite commis l’erreur 19.Fg5? qui n’a aucun sens en fait, et que j’ai joué beaucoup trop vite. Dans mon esprit 19…h6 20.Fh4 ne changeait rien, mais en fait 20…g5 21.Fg3 Rg7 suivi de …f5-f4 n’allait pas du tout, et j’ai donc dû me résoudre au triste 20.Fxe7.

C’est dommage parce que tout était mieux pour les Blancs avec la paire de Fous, par exemple 19.a4, ou 19.Cd2-c4, voire 19.Ff4 (nulle, 31 coups).

Dans la première partie rapide, j’ai fait une bonne ouverture avec les noirs.

Aronian-Mvl, ¼ finale tie-break (1).
Aronian-Mvl, ¼ finale tie-break (1).

A un moment, en voulant mettre la pression au temps, je me suis un peu enflammé avec 15…Fc6, oubliant 16.Ce4!. J’aurais dû jouer 15…Cc6. Je sais que Magnus, qui commentait en direct, a plutôt critiqué le coup suivant 16…Fxe4, mais devant l’échiquier j’ai eu le sentiment que j’avais déjà gâché. Donc, Magnus et moi arrivons à la même conclusion mais avec un coup de décalage !

Après, dans mon esprit, je continuais quand même à jouer pour l’initiative. D’ailleurs, je suis étonné que ce soit limite moins bien pour les Noirs, car ça n’a quand même pas une tête à être défavorable ! Du coup, j’ai été un peu surpris qu’il me propose nulle, car je voyais arriver une finale complexe où tout le monde allait avoir sa chance (nulle, 31 coups).

La salle de jeu s’éclaircit ! (Photo : Fide).
La salle de jeu s’éclaircit ! (Photo : Fide).

Dans la deuxième, j’ai obtenu une bonne position mais je me suis vraiment emmêlé les pinceaux.

Mvl-Aronian, ¼ finale tie-break (2).
Mvl-Aronian, ¼ finale tie-break (2).

Dans cette position, je me suis rendu compte que le Cavalier noir allait arriver en c5 et que je n’aurais plus rien. J’ai donc pris la décision de jouer 22.Dc1 Cd7 23.Da3 Cc5 24.f4. Evidemment, c’est faux à cause de 24…exf4 25.Cf5 Df8 26.gxf4 Tf6 suivi du sacrifice de qualité 27…Txf5! qui profite de l’éloignement de la Dame blanche. Mais il fallait le voir dès le début de la variante, et j’ai raté ce coup. Sans ce sacrifice de qualité, ce que j’ai fait n’aurait pas été aussi critiqué ! Du coup, ça a été la douche froide pour moi, parce qu’à aucun moment de la variante je n’ai réalisé qu’il y avait ce 27…Txf5!. Quelques coups plus tard, Levon a raté un gain direct, que je n’avais pas vu non plus d’ailleurs 🙂 ; mais en rapide, dans des positions très riches tactiquement, vraiment ce sont des choses inévitables, on ne peut pas tout voir comme la machine.

Après, je sentais qu’il n’avait plus trop d’avantage ; et au lieu de prendre la nulle par perpétuel, il a gaffé horriblement en donnant une pièce. Evidemment, il a compris tout de suite et il s’est un peu décomposé (1-0, 53 coups).

Il faut dire que le format est très violent ; on a eu le même jour l’Armaggedon dramatique entre Yu Yangyi et Vitiugov, un summum dans le genre…

En interview avec l’ami arménien (Photo : Fide).
En interview avec l’ami arménien (Photo : Fide).

½ Finale :

MVL – RADJABOV (2758) 0.5-1.5

Dans le match aller, j’ai joué le premier coup du tournoi dont j’étais fier, c’est 11.Te1.

Mvl-Radjabov, 1/2 finale aller.
Mvl-Radjabov, 1/2 finale aller.

D’ailleurs, ce n’est pas le coup que j’avais dans mon fichier 🙂 mais sur l’échiquier, 11.Te1, avec l’idée de pouvoir jouer Fe3, m’a beaucoup plu. Je me disais que c’était un peu un coup à la Grischuk ! Tu réfléchis 15 minutes sur cette position, on se demande bien pourquoi et ça a l’air d’être n’importe quoi, puis tu lâches un petit coup qui a l’air anodin. Heureusement pour lui, après 11..Cf7 12.Fe3, il a 12…Db7, seul coup. Si 12…Dxb2? 13.Tab1! Dxc3 14.Fd4 Dd3 15.Tbd1 et la Tour protège e4 ! Et si 12…Da6 13.Dxa6 Fxa6 14.Tad1 suivi de 15.c5 est désagréable pour les noirs. Après 12…Db7, le problème pour moi, c’est que je ne peux plus jouer 13.c5 car b2 devient prenable, la Dame noire ressortant maintenant du piège via d3 et a6.

Du coup j’ai joué 13.Db3, et j’étais plutôt content de moi sur le coup ! Je pensais être un peu mieux, ce qui a effectivement été le cas dans la partie, mais parce qu’il a raté 13…Tb8! 14.Dxb7 Txb7 15.b3 f5 16.Fd4 e5!, et son contre-jeu dynamique compense ce qui me semblait être un avantage blanc statique. En revanche, après 13…Dxb3?! 14.axb3 Tb8 15.Txa7 Txb3 16.Ca4 Tb7 17.Txb7 Fxb7 18.Cb6!, j’ai pris l’avantage.

Malheureusement, il y a eu un moment où je n’ai pas bien cerné la position. Après 18…d6 19.c5 e5, j’aurais dû jouer 20.Ta1! au lieu de 20.b4?!.

En fait, j’y ai renoncé car sur l’échiquier, je n’aimais pas la position après 20…d5 21.Ta7 Tb8, et 21.exd5 cxd5 22.b4 d4 me semblait également très incertain ; je pensais que ça pouvait mal tourner… Mais c’est juste un net avantage pour moi, même si ça devient beaucoup plus tendu, et sans garantie ! Tel que j’ai joué, j’ai juste abandonné l’avantage (nulle, 31 coups).

Dans le match retour, comme d’habitude, je me suis planté dans l’ouverture. Je sais que je n’aurais pas dû jouer si vite…

Radjabov-Mvl, 1/2 finale retour.
Radjabov-Mvl, 1/2 finale retour.

… Ce qui s’est passé dans ma tête c’est qu’au lieu de 10…0-0, je pensais jouer 10…Fc6, mais j’ai vu le très désagréable 11.b4! ; si 11…cxb4 12.cxb4 Fxb4 13.Db2!, et si 11…b6 12.b5 Fb7, les blancs vont manoeuvrer le Cavalier vers c4. Du coup, je suis revenu vers 10…0-0, et je me suis dit que sur 11.e5 j’avais 11…Fc6 ; j’empêche 12.De4 ; j’empêche aussi 12.Fg5. Et c’est quand j’ai posé le Roi en g8 que j’ai vu 11.e5 Fc6 12.Cg5! et constaté l’horreur de ma position !

Et ensuite y’a pas grand-chose à faire, l’attaque blanche est terrible. Ce que j’aurais dû jouer en pratique, mais je n’ai pas trouvé l’idée, c’est 12…g6 au lieu de 12…h6. Après 13.Cxh7, certes 13…Rxh7? perd en ligne sur 14.Dh5+ suivi de 15.Fxg6, mais j’avais 13…c4!? qui lui compliquait la vie et qui était beaucoup moins facile pour lui que dans la partie.

Plus tard, les commentateurs ont estimé que j’aurais eu de petites chances en échangeant les Dames, ce que j’aurais pu effectivement faire par deux fois. Mais pour moi, les finales étaient techniquement perdues, donc ce n’était pas vraiment une option non plus (1-0, 45 coups).

Si près, si loin… (Photo : Fide).
Si près, si loin… (Photo : Fide).

Du coup, je suis sorti de la Coupe du Monde par la petite porte, en ratant une nouvelle fois ma qualification directe pour les Candidats au dernier obstacle. Ce soir-là, j’étais dégouté et je serais bien rentré à Paris tout de suite, mais non, il y avait encore une semaine sur place afin de disputer le match pour la 3e place contre Yu Yangyi !

Match pour la 3e place :

MVL-YU YANGYI (2763) 4-2

Du coup, j’ai essayé de penser à autre chose, j’ai fait un peu tout et n’importe quoi pendant les deux jours off qui précédaient ce dernier match. J’étais déjà en mode économie d’énergie depuis quelques temps, et ça a été encore plus le cas contre Yu. Dans la première partie, il a joué un coup nouveau dans la ligne principale de la Grünfeld avec 5.Db3.

Yu Yangyi-Mvl, Match pour la 3e place (1).
Yu Yangyi-Mvl, Match pour la 3e place (1).

Je l’attendais depuis bien longtemps, ce 15.e5 ! Ca fait en effet 6 ans que je l’ai dans mes fichiers, y compris la position de finale que nous avons obtenue après 15… Cg4 16. e6 fxe6 17. h3 Ce5 18. dxe6 Fxe6 19. Dxd8 Taxd8 20.Fxb5 Fc4 21. Fxe8 Cd3+ 22. Rf1 Fxc3 23. bxc3 Cxc1+ 24. Rg1 Ce2+ 25. Rh2 Txe8 26. The1 ! Je pense que tous les spécialistes de cette ligne connaissaient également ce coup, et savaient qu’il donnait des positions où les noirs doivent faire 2-3 coups précis pour égaliser (nulle, 36 coups).

Dans la deuxième partie, je ne m’attendais pas à ce qu’il rejoue une ligne de la Petroff qu’il avait essayée quelques semaines auparavant contre Wei Yi, mais qui me semblait un peu artificielle. Mais le fait est que je n’ai rien obtenu… (nulle, 30 coups).

Dans la troisième partie, j’ai été en difficulté sur une ligne de jeu très rare de la variante d’Echange de la Grünfeld, avec une poussée 9.d5 précoce.

J’ai pris la décision de réagir de manière très concrète en amplifiant la tension centrale par 12…f5, qui n’était clairement pas nécessaire. Il a répondu de manière très efficace !

Yu Yangyi-Mvl, Match pour la 3e place (3).
Yu Yangyi-Mvl, Match pour la 3e place (3).

… Et c’est après 21.Te2! que j’ai compris que je me retrouvais clairement moins bien. Par chance, après 21…Tfc8 22.Da5 Tc4 23.Cd5 Dd4 24.Te7 Tac8, il n’a pas joué 25.Da3!, qui me laissait dans mon pétrin après 25…Dc5 26.Dxc5 T4xc5 27.g4! et ma position tient sur un fil. Pendant la partie, il était impossible de mesurer précisément ce qui se passait, mais le fait est que je ne me sentais pas spécialement rassuré ; j’imaginais bien qu’il y avait des trucs qui pouvaient mal se passer ! Je pense qu’il a cru prendre un net avantage par 25.Td1 Tc1 26.Tee1, mais qu’il a oublié 26…Cc4 27.Db4 Txd1 28.Txd1 Db2 29.De7 Dg7! et le pire est derrière moi (nulle, 32 coups).

La fin d’un très long tournoi… (Photo : Fide).
La fin d’un très long tournoi… (Photo : Fide).

Dans la dernière partie classique, Yu a fait un nouveau choix surprenant dans la Petroff. Je pensais être un peu mieux dans une position qui me rappelait la partie Topalov-Giri, Wijk aan zee 2012, remportée par les blancs.

Topalov-Giri, Wijk aan zee 2012.
Topalov-Giri, Wijk aan zee 2012.

Il me semblait qu’à long terme, comme dans la partie de Topalov, le Roi blanc était plus en sécurité que son homologue. Bon, sur l’échiquier, j’avais oublié les pions c doublés de Giri, qui constituaient un facteur aggravant pour les noirs.

Mvl-Yu Yangyi, Match pour la 3e place (4).
Mvl-Yu Yangyi, Match pour la 3e place (4).

Du coup, dans la partie, j’ai peut-être surestimé ma position parce qu’en fait, je n’arrive pas à jouer g3 et f4 pour fixer la structure, auquel cas j’aurais pu pilonner le pion e6 et prétendre à l’avantage. Malheureusement, si à la place de 19.Td2 dans la position du diagramme, j’avais joué 19.f4, qui était d’ailleurs ma première idée, les noirs égalisaient complètement par 19…Df7! 20.g3 e5 avec une finale de Tours nulle à venir. Du coup, je n’ai trouvé aucun moyen réaliste de jouer pour le gain (nulle, 30 coups).

Dans le premier départage, Yu a renoncé à défendre une troisième Petroff ! Dans l’ensemble, j’ai bien maîtrisé cette partie, même si j’ai raté un mat rapide qui aurait abrégé ses souffrances !

Mvl-Yu Yangyi, Match pour la 3e place (tie-break 1).
Mvl-Yu Yangyi, Match pour la 3e place (tie-break 1).

Ici, j’ai opté pour la finale de pièces lourdes gagnante par 42.Txa6 Df5 43.Rg2 Dxh5 44.Txe6, mais évidemment, 42.Tc8! Txc8 43.Dxf7+ Rh8 44.Fg6 était plus efficace ! (1-0, 66 coups).

Dans le deuxième départage, il devait impérativement gagner mais il s’est complètement planté dans l’ouverture et je me suis imposé facilement.

Yu Yangyi-Mvl, Match pour la 3e place (tie-break 2).
Yu Yangyi-Mvl, Match pour la 3e place (tie-break 2).

23…Fb5+ 24.Re1 Fc3+ 0-1 illustre la puissance de la paire de Fous !

De l'autre côté de la barrière
De l’autre côté de la barrière (Photo : Fide).

Même si une médaille de bronze en Coupe du Monde reste un excellent résultat, je garde un sentiment mitigé de ce mois de septembre passé en Russie 🙂 . Cela dit, avant la Coupe du Monde, je misais déjà plutôt sur les Grand Prix FIDE. La Coupe du monde, c’était une  » tentative bonus  » de me qualifier pour les Candidats ; je considérais que j’avais 15-20% de chances.

Evidemment, c’est rageant de perdre en demi-finale et d’être une fois de plus le premier non-qualifié, mais d’un autre côté, il y a eu beaucoup de moments très chauds, et j’aurais vraiment pu sortir du tournoi plus tôt ! Dans l’ensemble, j’ai beaucoup moins bien joué sur cette Coupe du Monde qu’en 2017 où je crois que je le méritais vraiment plus.

Un mois de travail, une médaille de bronze (Photo : Fide).
Un mois de travail, une médaille de bronze (Photo : Fide).

Maintenant, il me reste les deux derniers Grand-Prix FIDE à Hambourg et Tel-Aviv ; j’estime que j’ai de bonnes chances de me qualifier, au-delà des 50%. Quant aux spéculations sur la wild-card que donneront les organisateurs russes, je préfère les laisser aux commentateurs. Ce n’est pas mon sujet pour l’instant… Le mien, c’est d’être au top le 5 novembre à Hambourg !

L’équipe de France dispute actuellement le Championnat d’Europe des Nations à Batumi (Georgie). Comme il a eu l’occasion de s’en expliquer plusieurs fois, Maxime avait décidé dès le début de l’année 2019 que le calendrier international de cette année ne lui permettrait pas d’y participer. Il est clair que ce problème de déséquilibre flagrant entre les deux semestres de l’année, l’un très aéré, et l’autre très embouteillé, devra être résolu en priorité pour la saison 2020.
Profitons de ce Championnat d’Europe en cours pour visualiser une sympathique animation vidéo qui retrace de nombreuses données chiffrées sur l’élite française depuis le début du siècle… (merci à Natacha pour la réalisation 🙂 ). L’occasion d’apprendre que Maxime vient de fêter un autre anniversaire que celui de ses 29 printemps, puisque avec 106 mois passés à la première place française, il bat le vieux record détenu jusqu’alors par Joël Lautier (105 mois entre 1990 et 2004) !

Maxime’s games:

Ma Coupe du Monde (1re partie)

La Coupe du Monde, c’est un format que j’aime bien… Je les ai toutes disputées depuis 2009, avec deux demi-finales et un quart-de-finale à mon actif. D’abord, c’est une compétition qui change un peu de notre ordinaire, il y a plus de spectacle et d’enjeu, c’est sympa également pour les spectateurs. Mais c’est aussi un tournoi très difficile évidemment, et très long ; sauf si tu es éliminé au premier tour ! Quand tu vas jusqu’au bout, c’est un mois entier au même endroit (en l’occurrence en Sibérie 🙂 ), avec la pression à chacune des parties, car toutes sont décisives. Ca influe énormément sur la résistance physique des joueurs ; pour ma part, je pense qu’à Khanty-Mansiysk, j’ai plutôt été bien physiquement jusqu’à mon quart de finale, mais après ça s’est dégradé très vite. Je sentais que je ne pouvais plus rien faire le soir, j’étais juste en mode pilote automatique pour essayer de me reposer un max.

Mais commençons par le commencement !

1er tour :

MVL – ANWULI (2284) 2-0

Un premier tour contre un adversaire beaucoup moins bien classé, c’est toujours une entrée en matière où il faut faire preuve d’un minimum d’application. Je l’ai fait et malgré tout, je me suis causé quelques petits problèmes. Je pense à la première partie, où la finale de Tours était peut-être objectivement nulle.

Mvl-Anwuli, Round 1, first game.
Mvl-Anwuli, Round 1, first game.

J’ai l’impression qu’après 38.g4! (au lieu de 38.Rg4? qu’il a choisi), le mieux pour moi aurait été d’obtenir la fameuse finale avec h et f, qui reste néanmoins une nulle théorique très difficile à aller chercher.

Il y a aussi eu des petits ratés à partir d’une position très prometteuse dans la deuxième partie. Je dois dire que le MI Nigérian a plutôt bien défendu ses chances dans l’ensemble. Mais c’est dur quand tu n’as pas de vrai répertoire d’ouvertures, ce qui est son cas :).

Fier d’avoir perdu sans démériter, le Nigérian Anwuli pose avec son vainqueur.
Fier d’avoir perdu sans démériter, le Nigérian Anwuli pose avec son vainqueur.

2e tour :

MVL – KOVALENKO (2674) 2-0

J’ai été surpris par son choix dans l’ouverture de la première partie (Sicilienne avec …e6), et il s’est retrouvé en très grosse difficulté. En plus, ce n’est pas du tout son style de défendre des positions de ce genre.

Mvl-Kovalenko, 2e tour aller.
Mvl-Kovalenko, 2e tour aller.

Malgré tout, il y a eu la bourde juste avant le 40ème, où j’ai oublié …Tc8 dans une variante critique… Le pire, c’est que j’avais réfléchi longtemps avant de jouer 40.b5? dans la position du diagramme. Mais il s’avère que la rupture est trop précipitée ! Elle devait être mieux préparée, car après 40…axb5 41.Fxb5 Tc8!, j’ai dû me rendre à l’évidence que mon avantage s’était évaporé ; 42.Tb1 Tc2+ 43.Rg1 Cc8 44.Td7+ Txd7 45.Fxd7 et heureusement ici, il a joué 45…Cd6? au lieu de prendre en b6, malgré une longue réflexion ! Après 45…Cxb6!, je pouvais encore essayer 46.Fb5!? – avec l’idée Fd3-e4 – qui pose encore des problèmes, même si c’est sûrement nul objectivement. Hormis cette percée en b5 mal maîtrisée, c’était quand même une bonne partie, notamment dans la phase de milieu de jeu pour obtenir l’avantage (24.Ta3!).

Dans la deuxième partie, une nulle suffisait évidemment, ce qui est plutôt agréable comme situation. Sur son ouverture un peu baroque, 1.e4 c5 2.Cc3 d6 3.Cge2 Cf6 4.f3!?, j’aurais sans doute dû jouer 4…e5, mais sur l’échiquier, 4…d5 ne me semblait pas si mal. Mais en fait, la position obtenue n’était pas si triviale…

Kovalenko-Mvl, 2e tour retour.
Kovalenko-Mvl, 2e tour retour.

… et même désagréable après que j’ai joué 13…Re7?! un peu trop vite. Sur 14.Fb5 Td8 (à l’origine, j’avais prévu 14…Fd7 15.The1 Thd8 16.Cf5 Rf8 17.Cd6 Tab8, mais j’avais oublié 18.Cxb7! Txb7 19.Fxc6) 15.Fxc6 bxc6 16.Txd8 Txd8 17.f4, les blancs ont obtenu une finale plus agréable. Dans la position du diagramme, j’avais également rejeté 13…Fd7 à cause de 14.Cc4 Re7 15.Cd6, mais c’était la suite égalisatrice car j’ai ici le joli retour 15…Fc8!, justifié par la variante 16.Fb5 Td8 17.Fxc6 Txd6 =. Après, je pense qu’il avait les moyens de presser un peu mieux que ce qu’il a fait. Il a amené son Roi en c3 un peu vite et en fait, ça ne sert à rien ! D’ailleurs, il est revenu en c1 rapidement ! Ensuite, il a tout tenté pour compliquer mais ce faisant, il a juste fait passer sa position de « égale » à « nettement moins bien ». Je lui ai longtemps laissé la chance de faire nulle, mais il a vraiment poussé le bouchon assez loin pour la perdre !

En interview après la qualification contre Kovalenko (Photo : Fide).
En interview après la qualification contre Kovalenko (Photo : Fide).

1/16e de finale :

MVL – JAKOVENKO (2681) 3.5-2.5

Un match compliqué, contre un adversaire lui aussi compliqué pour moi ! Il faut savoir que Jakovenko a un excellent score contre moi et qu’il a donc la confiance… Et ça se voyait ! Il était vraiment là pour jouer sa chance à fond. Par rapport, par exemple à Svidler au tour suivant, tu sens clairement la différence d’état d’esprit. Et c’était pas de bol pour Peter puisque apparemment, lui a un score monstre contre Jakovenko !

Bref, la première partie ne s’est pas trop bien passée, malgré la nulle… C’était d’ailleurs le premier d’une longue série d’oublis de ma part dans l’ouverture ! Heureusement, il a soulagé ma position en prenant deux décisions bizarres d’échanges centraux.

La Berlinoise au match retour, c’était ma première partie maîtrisée, même si pas jusqu’au bout. J’ai pris l’avantage, mais à partir de là, il a vraiment super bien défendu. J’ai peut-être loupé des occases.

Mvl-Jakovenko, 1/16e retour.
Mvl-Jakovenko, 1/16e retour.

Je soupçonne qu’à ce moment après 27…Fe6, c’est objectivement gagnant, mais je n’ai pas trouvé comment. Et puis, je pensais que ce que je faisais était correct, mais bizarrement après le 40e, j’ai juste pas trouvé de gain, et en fait, il n’y en a certainement déjà plus…

Du coup, premier tie-break !

Dans la première partie rapide, mes ennuis ont commencé dès que j’ai joué 11…b6. En fait ça, c’est une constante chez moi dans la Grünfeld, j’oublie la possibilité que d5 puisse être fort pour les blancs ! J’avais fait exactement la même erreur contre Aronian à Londres l’année dernière. Et d’ailleurs, la partie était vraiment très similaire : même rapport matériel, mêmes difficultés, et même tentative de contre-jeu. Sauf que Levon s’était planté à un moment, et pas Jakovenko !

Donc, après 11…b6 12.d5, j’ai réalisé que sur 12…Ce5 13.Cxe5 Fxe5, j’allais me prendre f4-e4-e5, comme contre Levon ! C’est assez évident bien sûr, mais c’est comme un bug que j’ai sur ce thème…

Après, j’ai eu une hésitation au 19e coup, qui m’a été fatale.

Jakovenko-Mvl, 1/16e tie-break (1).
Jakovenko-Mvl, 1/16e tie-break (1).

Au début, je voulais jouer 19…Da3 sans réfléchir. Et puis je me suis dit : « 19…Dh5 idée 20…Fg4, j’ai du jeu à l’aile-Roi », et ça m’a attiré.

En fait évidemment, 19…Da3! était le bon coup, pour garder un oeil sur d6 et avoir du contre-jeu à l’aile-Dame. Mais en fait, ma faute de jugement, c’est que je pensais que la Dame en h5 allait être plus proche pour la défense du Roi ; alors que c’est l’inverse, et elle est également trop exposée !

Ensuite, il a raté un gain forcé avec 25.Tb5!, mais c’est un coup de machine, pas naturel, et qui nous a échappé à tous les deux… Après, je n’ai pas grand-chose à me reprocher, j’ai trouvé toutes les défenses, mais il a juste joué la partie parfaite, y compris dans les grosse complications tactiques avec les pièces lourdes.

Jakovenko-Mvl, 1/16e tie-break (1).
Jakovenko-Mvl, 1/16e tie-break (1).

Ici, au lieu de 35…De6, je pouvais jouer la défense passive avec 35…Rg7 évidemment. Je le laisse faire 36.De7, et je balance mes pions de l’aile-Dame… Mais j’étais quasiment certain qu’à un moment il allait jouer h3 pour parer les mats du couloir ; ensuite, Dh4 ou Dd8 menaçant Te7, et je ne voyais pas dans quel monde ça pouvait tenir. Du coup, il a brillamment conclu par 36.Dd8+ Rf7 37.Tf1+ Tf5 38.Dc7+ Rg8 39.Td1 De2 40.Dc1! Tg5 (40…Tf8 41.d7 Td8 offre zéro chance de survie) 41.Dc8+! Rg7 42.Db7+ Rf8 43.Tg1! et le pion d décide.

L’ouverture du 2e tie-break, où Maxime doit impérativement l’emporter (Photo : Fide).
L’ouverture du 2e tie-break, où Maxime doit impérativement l’emporter (Photo : Fide).

Etant au pied du mur et au vu de l’ouverture, c’est vrai que l’égalisation dans la deuxième partie constitue un petit miracle ! Déjà, parce que je joue 15.De4 au lieu de 15.Ce4 comme j’avais prévu 🙂 ; j’aurai d’ailleurs l’occasion de jouer ce 15.Ce4 quelques jours plus tard contre Aronian. Mais après, du point de vue de Jakovenko, c’est toujours la même chose ; tu joues pour faire nulle, tu égalises dans l’ouverture et puis à un moment, tu veux aller au plus simple. Par exemple, quand il provoque la finale T+F de couleurs opposées.

Mvl-Jakovenko, 1/16e tie-break (2).
Mvl-Jakovenko, 1/16e tie-break (2).

Ici, 27…Fxe4 28.Fxe4 c6 n’avait rien d’obligatoire. Ce n’était pas nécessaire, mais d’un autre côté ça simplifie et tu te dis que tu ne vas jamais perdre ça ; en gros, il était « le cul entre deux chaises » et c’est jamais bon d’être le cul entre deux chaises ! Bien sûr, normalement c’est rien comme finale pour les blancs objectivement, mais ça peut aussi mal tourner. Et quand j’ai obtenu la position après 29.g3 g6 30.b4 Rf7 31.a4 a6 32.Rg2 Td7 33.Tb2! avec l’idée de percer en b5, je savais que j’avais désormais au moins 40% de chances de gain. Et j’ai effectivement fini par l’emporter et rester en vie dans le tournoi !

La deuxième série de rapides en 10′ a été tendue elle aussi (deux nulles), et puis finalement, j’ai gagné une belle partie avec les blancs en blitz.

Et dans le dernier blitz, j’ai fait l’inverse de ce qu’il a fait quand une nulle lui suffisait ! J’ai joué mon jeu normal, dynamique, et en fait, ces positions avec des structures de pions asymétriques, tu as l’impression que c’est moins annulant mais pour moi, c’est tellement plus simple à jouer !

Pendant la journée de repos, Mvl spectateur d’un match de hockey professionnel avec son adversaire malheureux de la veille, Dmitry Jakovenko (à gauche), qui vient d’ailleurs de donner le coup d’envoi sur la patinoire ! (Photo : FIDE).
Pendant la journée de repos, Mvl spectateur d’un match de hockey professionnel avec son adversaire malheureux de la veille, Dmitry Jakovenko (à gauche), qui vient d’ailleurs de donner le coup d’envoi sur la patinoire ! (Photo : FIDE).

1/8e de finale :

MVL – SVIDLER (2729) 1.5-0.5

Peter ne joue pas l’Espagnole Tchigorine d’habitude. Ma théorie, c’est qu’il ne s’attendait pas du tout à ce que j’accepte le Gambit Marshall, désormais réputé pour être archi-analysé et annulant dans la plupart des lignes. Du coup, je crois que ça l’a perturbé.

J’ai donc pris l’avantage de manière assez convaincante, avec ce qui me semblait être un bon pion de plus.

Mvl-Svidler, 1/8e aller.
Mvl-Svidler, 1/8e aller.

Pendant la partie, je n’imaginais pas du tout qu’il puisse complètement égaliser avec 31…Fd6!, comme le montre la machine. Le problème, c’est que dans ce cas, je n’installe pas le Fou en b4 comme dans la partie, puisque 32.Fb4? Dc2! serait désagréable. Du coup, après l’imprécis 31…Tc8? 32.Fb4 Dc1+ 33.Dd1 Dc4, j’ai joué 34.g3 parce que j’ai compris qu’il y avait vraiment de bonnes chances qu’il tombe dans le piège 34…Dxe4? 35.gxf4 Tc6, en oubliant la ressource 36.f5! Dxf5 37.Fd6!. D’ailleurs, j’avais aussi vu que 36.f3 devait gagner également. Mais bref, le connaissant, je sentais qu’il allait prendre en e4 !

Après, j’ai été surpris qu’il abandonne aussi vite, même s’il est connu pour ça. Parce que tu peux encore jouer un peu cette position finale :

Mvl-Svidler, 1/8e aller.
Mvl-Svidler, 1/8e aller.

Mon pion n’est qu’en a3, mon Roi n’est pas encore complètement en sécurité, ça pouvait mériter quelques coups en plus…

Dans l’ensemble, je considère que c’est une bonne partie de ma part.

En pleine discussion avec Svidler, juste après leur première partie (photo : Fide).
En pleine discussion avec Svidler, juste après leur première partie (photo : Fide).

Lors du match retour, il a plutôt réussi son choix d’ouverture, dans la sous-variante de la Najdorf 6.Cb3. Je me suis un petit peu enflammé avec 7…h5, mais je voulais éviter sa prépa.

Je me doutais que c’était 7…b5 8.a4 b4 9.Cd5 e6 la ligne critique. Et c’est ce qui était dans mes notes évidemment ! Mais je me suis dit :  » Je ne me rappelle de rien de plus ; c’est forcément ce qu’il a regardé en priorité. Donc, on va le sortir de sa prépa tout en jouant un coup qui a un petit peu de sens « . 7…g6 8.g4 pouvait vite devenir désagréable, donc je me suis décidé pour l’impro complète avec 7…h5.

 C’est pas facile, mais je vais quand même le jouer, ce 7…h5 ! (photo : Fide).
C’est pas facile, mais je vais quand même le jouer, ce 7…h5 ! (photo : Fide).

Après, je pense quand même que les blancs sont un peu mieux, et j’ai été très surpris de son choix 13.Dd4?!. Je comprends aussi que dans sa situation, conserver un petit plus par 13.Ca5 lui ait semblé moins prometteur qu’une variante qui mène au gain du pion a6. Pourtant, après 13.Ca5 avec f4-f5 à venir, ça pouvait vite devenir compliqué pour moi – il faut bien qu’il y ait des petits inconvénients à mettre le pion en h5 !

Svidler-Mvl, 1/8e retour.
Svidler-Mvl, 1/8e retour.

Je pense aussi qu’il a opté pour 13.Dd4?! parce qu’après 13…Tb8 14.Fxa6 0-0 15.Dd3 Fxa6 16.Txa6 Cc4, il avait oublié qu’il ne pouvait pas jouer 17.Ta7? à cause de 17…Cxb2!.

Du coup, il a dû se replier sur 17.Fc1, et après 17…e6 18.0-0 Cd7, j’ai obtenu la position de rêve. Ses pièces ne sont pas coordonnées, et il ne peut pas se redéployer sans perdre ses pions de l’Aile-Dame. D’ailleurs il a même poussé le bouchon trop loin et s’est retrouvé nettement moins bien. Mais j’ai préféré éviter les variantes complexes, même favorables, et forcer la nulle qui me qualifiait pour les 1/4 de finales.

(à suivre)

Le lendemain de son retour de Coupe du Monde, Maxime s’est rendu en Mairie d’Asnières, où son club organisait le « Trophée des Petits As », compétition sur invitation réunissant huit espoirs français de moins de 8 ans. L’idée était d’offrir à ces jeunes joueurs un contexte digne du haut niveau, avec des parties disputées dans d’excellentes conditions de jeu, et retransmises en direct sur Internet. Maxime est venu lancer les dernières rondes du dimanche, puis a prodigué un certain nombre de conseils aux joueurs, parmi lesquels certains de ses petits camarades de club 🙂 .

Les parties de Maxime :

Août dans le Missouri

Saint-Louis Chess Club (photo : www.grandchesstour.org).

L’enchaînement des tournois ces derniers mois a été vraiment difficile à encaisser. On a dit ici ou là que j’avais trop joué ; c’est vrai, mais je n’ai pas franchement eu le choix ! Le Grand Prix FIDE et le Grand Chess Tour sont incontournables, mais ils ont décidé des dates beaucoup trop tard. Sinon, j’aurais pu sacrifier le Norway Chess en juin, mais j’avais déjà signé le contrat depuis longtemps. Après, c’est surtout la série Zagreb-Riga-Paris qui a été dure, mais je ne vais quand même pas m’en vouloir d’être allé en finale à Riga !

Comme d’habitude depuis quelques années, mois d’août = Missouri ! Je suis arrivé aux U.S. un peu en avance… Evidemment, je n’avais pas eu énormément de temps entre la fin du Grand Chess Tour à Paris et ce long déplacement ; à peine quatre jours. Le tournoi démarrait le 10 août et je suis arrivé le 7 au soir, histoire d’avoir deux jours pleins pour absorber le décalage horaire et me reposer.

De toute façon, je savais en arrivant à Saint-Louis que je ne pourrais pas jouer à 100% tout au long des trois semaines, c’était strictement impossible. Après, j’espérais quand même avoir un état de forme plutôt acceptable au début. C’est plus important d’être en bon état physique, de bien calculer, que sur les parties longues. En classique, si on est un peu diminué, c’est pas si grave ; on a quand même le temps de faire attention, et la prépa va jouer un bon rôle, donc on va pouvoir limiter la casse dans tous les cas. D’ailleurs, c’est un peu ce qui s’est passé puisqu’au final j’ai effectivement sauvé les meubles avec 5/11 dans le Classique ! Vu comment j’ai joué, ça méritait pas -1 en termes de niveau de jeu. Mais on y reviendra plus loin…

SAINT-LOUIS, RAPIDE & BLITZ

Dans le Rapide, c’est vrai que la première partie m’a fait très mal. Je suis nettement mieux contre Aronian et je perds sur des erreurs tactiques en finale.

Heureusement, il y a eu dès la 3e ronde la partie spectaculaire contre Rapport, qui était une bonne partie dans l’esprit Romantique, mais qui aurait aussi pu très mal tourner.

Mvl-Rapport, Rapide Ronde 2.
Mvl-Rapport, Rapide Ronde 2.

28.Dxd7!?, un sacrifice de Dame spéculatif qui portera finalement ses fruits ! (1-0, 50 cps).

Ce qui fait que je limite la casse à 50% le premier jour. Après j’ai eu un très bon deuxième jour, un peu par miracle.

Certes, je fais une très bonne partie contre Ding. Et plutôt une bonne partie contre Mamedyarov, même si à un moment je suis perdant et qu’en aucun cas je ne dois la gagner, celle-là ! Et puis, contre Karjakin, ce que je gagne à partir d’une position symétrique et plate, c’est hallucinant aussi. 🙂

Mvl-Karjakin, Rapide Ronde 4.
Mvl-Karjakin, Rapide Ronde 4.

Dans la finale de Fous, il y a des chances pratiques, même si peu auraient parié sur une victoire blanche ! (1-0, 66 cps).

Dans les rues de Saint-Louis (photo : www.grandchesstour.org).
Dans les rues de Saint-Louis (photo : www.grandchesstour.org).

Le troisième jour, je perds contre Magnus mais là en revanche, je ne me démobilise pas et je gagne les deux dernières, plutôt de bonnes parties d’ailleurs; contre Dominguez d’abord, puis contre Caruana, hors du coup et qui était un peu en tilt.

Mvl-Dominguez, Rapide Ronde 8.

Dans cette position de Berlinoise qui a bien tourné pour les blancs (il en faut bien parfois 🙂 ), le thématique 22.e6! fxe6 23.Ff4 met les noirs sous une pression considérable (1-0, 44 cps).

La première journée de blitz, je n’ai pas si mal joué mais je n’ai vraiment pas eu de réussite (4.5/9). Je dois marquer au moins 1,5 point de plus ; contre Rapport, je suis clairement mieux et je me laisse embarquer par une erreur de calcul bête. Evidemment il y a aussi la partie contre Ding, où je suis d’abord gagnant, avant de jouer une combinaison fausse au lieu de prendre le perpétuel.

Mais surtout, cette partie contre Dominguez où j’ai quatre minutes d’avance à la pendule !

Dominguez-Mvl, Blitz Ronde 8.
Dominguez-Mvl, Blitz Ronde 8.

Ici, les blancs viennent de jouer 20.Fxf4 et j’ai repris mécaniquement en f4, avant de m’apercevoir que 20…Tfc8! intermédiaire était bien plus fort ; 21.Fd3 (sinon 21…Dc2+) 21…exf4, avec une bien meilleure version que dans la partie (1-0, 49 cps).

Le deuxième jour de blitz par contre, j’étais complètement hors du coup ; c’est un peu un miracle que je gagne les deux dernières, pour partager finalement la 2e place au classement général, à seulement un demi-point du vainqueur Aronian. Il y a des parties hallucinantes, contre Ding par exemple ; contre Caruana, j’en parle même pas…

Mvl-Caruana, Blitz Ronde 15.
Mvl-Caruana, Blitz Ronde 15.

Ca montre bien à mon sens que c’est pas du tout les nerfs qui sont en question ; ce genre de finale, pion net en plus, je les gagne 99 fois sur 100, nerfs ou pas nerfs. C’était juste de la fatigue pure, un vrai chemin de croix (0-1, 67 cps).

D’ailleurs, je gagne la dernière contre Aronian avec les noirs parce qu’une nulle lui suffisait pour gagner le tournoi, et qu’il était en panique, l’ami !

Après, 2e ex-aequo, c’était plutôt pas mal sur le plan comptable…

Classement du Rapide/Blitz de St-Louis (www.grandchesstour.org).
Classement du Rapide/Blitz de St-Louis (www.grandchesstour.org).

Mais j’étais tellement certain que je devais gagner le tournoi… En effet, après avoir fait -2 dans le blitz à Paris (8/18), je ne pouvais pas imaginer une performance similaire à Saint-Louis (8.5/18).

De toute façon, le calendrier cette année est un calendrier démentiel, et c’est vrai que j’ai fini la succession de tournois sur les rotules. Et quand on est fatigué, ça se voit en rapide, et encore plus en blitz. Tu réfléchis pas au bon moment, tu réfléchis parfois pas du tout, et au final, tu rates des suites tactiques simples.

En plus, quand tu es absent comme ça pendant presque 4 mois, tu ne peux pas te préparer correctement sur le plan physique. J’ai aussi eu quelques petits soucis physiques, notamment à Zagreb et à Riga, avec en plus une douleur lombaire qui m’a longtemps empêché de courir.

SINQUEFIELD CUP

Un tournoi qui réunit précisément les 10 meilleurs joueurs du monde, pas facile quand tu es un peu à la ramasse, en bout de course ! J’ai commencé par enchaîner les nulles pendant 7 parties. Mais psychologiquement, j’avais pris un petit coup dès la première partie contre Aronian.

Aronian-Mvl, Classique Ronde 1.
Aronian-Mvl, Classique Ronde 1.

Au lieu de 25…Fd3?!, répétant la position une troisième fois, je pouvais jouer 25…Fg6 suivi de la manœuvre …Ta7-c7, avec une position dominante. En fait, j’ai répété les coups car je ne pensais pas être spécialement mieux. Pourtant, c’est juste une boucherie dès que je double sur la colonne c. En temps normal, j’aurais continué la partie, mais je ne me sentais pas en forme, donc je ne me sentais pas spécialement mieux ; ce qui montre bien que je n’étais pas en forme d’ailleurs !

Après, je me suis peu à peu installé dans le tournoi ; j’ai fait quelques bonnes parties, par exemple contre Ding.

Contre So et Anand avec les blancs, je n’ai pas brillé dans l’ouverture. D’une manière générale dans ce tournoi, je me rappelais très mal de mes prépas, avec notamment beaucoup d’oublis étonnants ; encore une fois c’est toujours lié à la même chose, l’état de forme général…

La partie de la ronde 6 contre Caruana était très correcte, un vrai débat théorique à haute intensité sur la Najdorf.

Mais les horreurs ont commencé le lendemain, contre Mamedyarov.

Mvl-Mamedyarov, Classique Ronde 7.
Mvl-Mamedyarov, Classique Ronde 7.

Alors là, la position que j’obtiens ! Je suis sorti de l’ouverture avec un bel avantage ; paire de Fous, espace, et un Fh5 excentré.

Et puis ensuite, comment je la sabote ! En fait, j’ai regretté tout de suite d’avoir joué 20.Fb2. Le Fou devait rester en c1, et 20.g4 Fg6 21.h4 était le bon plan. C’est moi qui vais jouer g5 et pas lui, et après je mettrai le Fou en b2 ; ensuite f4, et c’est juste une position terrible à défendre pour les noirs (1/2, 33 cps).

Entre les rondes… (photo : www.grandchesstour.org).
Entre les rondes… (photo : www.grandchesstour.org).

Et à la ronde 8, première partie décisive. Mais je suis du mauvais côté ! Franchement, quand j’y repense, c’est du délire…

Karjakin-Mvl, Classique Ronde 8.
Karjakin-Mvl, Classique Ronde 8.

Dans cette position théorique de la variante d’échange de la Grünfeld, que j’ai dans mes fiches, j’ai joué 17…bxc5? sans réfléchir ; par réflexe, en pensant mécaniquement que c’était forcé. Et ça mène à une finale cauchemardesque à défendre. Et puis, je me suis souvenu – mais trop tard évidemment 🙂 – que c’était 21…Fh3! le coup de la position ! (1-0, 51 cps).

Le lendemain contre Nakamura, le calvaire a continué, malgré une bonne prépa cette fois.

Mvl-Nakamura, Classique Ronde 9.
Mvl-Nakamura, Classique Ronde 9.

Dans cette position, c’est hallucinant mais 20.Dh4!, je n’y ai même pas pensé une seconde ! Pourtant, la menace Dh5-g6 est si puissante que la position noire ne devrait pas y résister. C’est un coup que je jouerais normalement a tempo en blitz. D’ailleurs, ce n’est même pas la question de jouer trop vite ou pas trop vite, puisque j’ai joué l’insipide 20.De3?! en plus de 4 minutes. Et 20.Dh4!, j’y ai juste pas pensé…

Alors bien sûr, même après 20.De3?!, je garde un bon avantage. Après, j’ai pris la décision de rentrer en finale car je pensais que c’était meilleur que de garder le pion. Probablement pas idiot, mais ensuite je me suis de toute façon mélangé les pinceaux (1/2, 59 cps).

Le lendemain, pour prouver que je n’étais pas le seul à faire des bêtises, Nepo m’a fait un superbe cadeau en se trompant de case pour son Cavalier ! Ma phase de conversion n’a pas été idéale, mais heureusement, il y avait de la marge !

Pour finir, contre Carlsen, je ne voulais pas me contenter de forcer la nulle avec les blancs. J’ai donc choisi la Rossolimo contre sa Sicilienne, et je pense que l’ouverture ne s’est pas si mal passée, même si le plan normal, c’est évidemment de jouer Ch4 suivi de f4.

Mvl-Carlsen, Classique Ronde 11.
Mvl-Carlsen, Classique Ronde 11.

Mais si 14.Ch4, je n’aimais pas trop 14…Ce5 15.Dg3 Cc6, avec l’idée 16.f4 f5! ; même 14…e6 15.f4 g5!? me semblait également intéressant pour lui. Donc, j’ai pris la décision de jouer 14.h4!?, un coup que Magnus a critiqué ; mais je crois malgré tout que ce n’était pas un mauvais coup. Après 14…Tb7 15.h5 g5, j’ai hésité entre 16.Ch2 et 16.Ce2. Je ne sais plus pourquoi, mais j’ai opté pour le premier, qui est nettement moins bon. Après 16.Ce2-g3, j’aurais plus ou moins forcé …e6, et c’est là que j’ai pêché. J’ai cru que …e6 lui permettait de justifier son coup 14…Tb7 mais dans ce cas en fait, f6 est bien plus faible, le Fc8 n’est plus en jeu, et il n’y a plus jamais de …f5. Pour toutes ces raisons, cette manoeuvre de Cavalier vers g3 était bien meilleure que mon choix de la partie 16.Ch2.

Après, j’ai commencé à être surpris par ses coups…

Mvl-Carlsen.
Mvl-Carlsen.

Et quand 21…f5 est arrivé, je n’aimais plus trop ma position. Sur 22.exf5, je ne craignais pas de donner la qualité en cas de 22…Fd4, mais le simple 22…Fxf5 m’a dissuadé, alors qu’il y a 23.Tg3!, que je n’ai pas vu. Bon, c’est vrai que je ne me suis pas non plus laissé le temps de le voir ! Du coup, je suis revenu sur 22.exf5 et j’ai vu 22.Cf3? à la place. Je me suis dit :  » c’est bon, y’a pas 22…Fd4, et 22…fxe4 23.Cxe4 me va bien. Enfin, y’a pas non plus 22…e5 à cause de 23.Fg5! « . J’ai donc joué 22.Cf3?, je me suis levé, et quand je suis revenu et que j’ai vu qu’il avait répondu 22…Fxc3!, j’ai tout de suite compris que c’était sans retour. J’ai encore trouvé 23.Td3!? qui permet de pêcher en eau trouble, mais pas suffisamment (0-1, 44 cps).

Félicitations à Carlsen, qui termine à la première place ex-aequo grâce à son sprint final. Et énormes félicitations à Ding Liren, qui a réussi l’exploit de battre le champion du monde au tie-break !

Je suis donc le premier joueur à avoir bouclé le Grand Chess Tour 2019, tous les autres joueront au moins un des deux derniers tournois (Bucarest et Calcutta en novembre). Du coup, mes chances de prendre une des 4 places qualificatives pour la finale à Londres sont maintenant très hypothétiques.

Classement du Grand Chess Tour 2019 après 5 tournois (www.grandchesstour.org).
Classement du Grand Chess Tour 2019 après 5 tournois (www.grandchesstour.org).

Mais chaque chose en son temps, une autre échéance importante m’attend très prochainement ; le début de la Coupe du Monde à Khanty-Mansyisk (Russie), mardi 10 septembre. L’objectif est affiché : une place en finale pour gagner le droit de disputer le Tournoi des Candidats en mars 2020…

En rentrant de Saint-Louis, Maxime avait au programme une soirée de parties rapides sur Internet, dans le cadre des 1/8e de finales du Speed Chess Championship organisé par www.chess.com. Le format de l’édition 2019 est inchangé, avec 90 minutes de 5|1, 60 minutes de 3|1, et 30 minutes de 1|1. Apparié contre le n°1 mondial junior, Wei Yi (2727), Maxime a connu un début de match très laborieux, encaissant cinq défaites de rang pour être mené 1.5-5.5 après 7 parties ! Mais il ne s’est pas démobilisé, et a outrancièrement dominé le reste du match, alignant notamment une série de 7 victoires consécutives, puis une autre de 5, pour finalement s’imposer sur le score sans appel de 21-10. En demi-finale – courant octobre – il sera opposé au vainqueur du match Mamedyarov-So.

Les parties de Maxime à la Sinquefield Cup (Site officiel) :
Les parties de Maxime à Saint Louis (Site officiel) :
Les parties de Maxime sur chess.com(Site officiel) :

3 tournois d’affilée !

MVL, le Boss à Paris ! (Photo : Justin Kollar, GCT).

Je viens de faire un marathon de six semaines non-stop. Je suis en effet parti le 24 juin pour le tournoi classique du Grand Chess Tour à Zagreb. Le 9 juillet, je suis allé directement à Riga pour le Grand Prix FIDE, puis retour à Paris pour le Rapide & Blitz du Grand Chess Tour. Je ne suis revenu chez moi que le 2 août !

Je suis donc fatigué, c’est sûr… Evidemment, je savais que le calendrier allait nous imposer ce rythme infernal cette année. Mais je n’ai pas pu avoir le niveau de préparation physique requis pour avoir la « caisse » pendant toute cette longue période. Par chance, je suis arrivé à Zagreb plutôt en forme, mais paradoxalement j’ai mal joué dans l’ensemble en Croatie. C’est sûr que les conditions de jeu n’ont pas aidé. Notamment la clim – d’une autre époque – qui fonctionnait à plein régime dans la salle de jeu, occasionnant un boucan d’enfer. Franchement, ça a été un vrai problème pour moi, d’autant que d’autres détails dans l’organisation laissaient à désirer. C’est dommage d’ailleurs, car Zagreb est une ville très agréable, et j’ai aimé son ambiance, ses restaurants etc…

Du coup, à mi-tournoi, j’ai plus ou moins lâché, et je me suis clairement économisé. J’ai profité de ces quelques jours et du transit vers Riga pour oublier ce mauvais moment échiquéen en Croatie, et refaire le plein d’énergie.

Dernière ronde; Carlsen est debout, mais il vient de jouer 31.a3! et la position noire s’écroule. Zagreb, un tournoi à oublier… (Photo : Leenart Ootes, GCT).
Dernière ronde; Carlsen est debout, mais il vient de jouer 31.a3! et la position noire s’écroule. Zagreb, un tournoi à oublier… (Photo : Leenart Ootes, GCT).

Et en Lettonie, je dois dire que tout s’est vraiment passé comme sur des roulettes. J’ai été surpris moi-même de n’avoir aucun départage (avant la finale), et de bénéficier pour une fois de circonstances aussi favorables !

Mvl-Navara, Riga, 1er tour aller.
Mvl-Navara, Riga, 1er tour aller.

Grâce à une bonne préparation, j’ai rapidement obtenu un gros avantage, que j’aurais sans doute fait fructifier avec le simple 13.Dxg7 Tg8 14.Dh6. A la place, j’ai joué l’imprécis 13.Ce2?, qui permettait aux noirs de revenir dans la partie par 13…Fb6, car maintenant 14.Dxg7 Tg8 15.Dh6 autoriserait 15…e4!, cassant la coordination des pièces blanches. Heureusement, le Tchèque a opté pour 13…0-0?, et après 14.Ff5!, j’ai repris le cours normal de mon avantage (1-0, 19 cps).

Contre Topalov en ¼ de finale, la première partie était certes à double-tranchant, mais elle a très bien tourné pour moi. Pourtant tout n’était pas parfait non plus, car comme contre Navara, il y a un moment où je n’ai pas très bien calculé…

Topalov-Mvl, Riga, ¼ finale aller.
Topalov-Mvl, Riga, ¼ finale aller.

La position noire serait techniquement gagnée après un coup normal comme 43…Te5 ou 43…Cb7, mais j’ai vu une solution tactique avec 43…h5 44.gxh5 f5 45.Fxf5 Tf7 46.Fg6 Tf2+ 47.Rb1 Txh2 48.Ce4 g4, oubliant que sur 49.Ff5 (Topalov a choisi l’inférieur 49.Rc1?), seul 49…Tg2! gagnait. J’ai tout de même fini par l’emporter (0-1, 57 cps).

Bizarrement, j’ai fait ma meilleure partie lors du match retour de demi-finale contre Grischuk, alors même que j’avais un petit souci de santé et que je me sentais vraiment sans énergie. J’ai proposé nulle très rapidement, mais il a refusé et j’ai utilisé ce qui me restait de force pour gagner cette partie à l’arrache ! Cette qualification pour la finale sans passer par les départages m’a permis d’avoir deux jours pleins de repos et de décompression. J’ai pu aborder le match contre Mamedyarov en meilleure forme, mais celui-ci a connu tellement de rebondissements que je ne suis pas encore en mesure de l’analyser avec clarté. Bien sûr, il est dommage d’avoir perdu cet ultime départage en Armageddon, mais je choisis de retenir l’excellente opération comptable effectuée à Riga (8 points), notamment grâce aux 3 points de bonus engrangés pour avoir gagné mes trois premiers matches sans départages.

Grille du GP FIDE après 2 tournois (https://fr.wikipedia.org).
Grille du GP FIDE après 2 tournois (https://fr.wikipedia.org).

Certes, une victoire m’aurait donné 11 points au lieu de 8, et même si je n’aurais pas pris tout de suite mon billet pour les Candidats, mes chances de qualif auraient alors été de 95%. Avec 8 points, j’estime désormais mes chances dans le Grand Prix FIDE à 50-60%. Bien sûr, il faudra que j’arrive en forme pour les deux derniers tournois à Hambourg et Tel-Aviv, et j’ai bien conscience que personne n’est à l’abri d’une élimination au premier tour et d’un zéro pointé ! (Giri et Aronian ont tous deux marqué 0 en deux tournois…). Mais dans mon esprit, si je fais une finale ou deux demi-finales, je suis qualifié ; et peut-être même moins, avec un ou deux points de bonus grappillés ici ou là…

Après, il faut aussi tenir compte de la possibilité de se qualifier via la Coupe du Monde (à partir du 10 septembre à Kanty-Mansiik, Russie), ce qui augmente les probabilités. 🙂

Finaliste à Riga, un bon résultat ! (Photo : Niki Riga, World Chess).
Finaliste à Riga, un bon résultat ! (Photo : Niki Riga, World Chess).

Du coup, je ne suis revenu de Riga que le 25 juillet, et dès le lendemain, le Grand Chess Tour commençait à Paris, avec une après-midi consacrée à la presse et aux réunions techniques. Il va de soi que la fatigue de l’enchaînement commençait à peser sérieusement…

Le premier jour des Rapides, j’ai mal joué et j’ai eu beaucoup de réussite, notamment contre Dubov à la première ronde. La deuxième journée était clairement la plus aboutie, avec notamment une très bonne partie contre Caruana.

Mvl-Caruana, Paris Rapide, ronde 5.
Mvl-Caruana, Paris Rapide, ronde 5.

Ici, au lieu de 9.Dxe5, j’avais préparé la nouveauté 9.Dxd8+ Rxd8 10.Fg2!, un sacrifice de pion qui permet aux blancs d’exercer rapidement une forte pression sur l’aile-Dame (1-0, 53 cps).

Etant en pole-position, j’ai joué la troisième journée en roue libre ; deux nulles rapides avec les blancs contre Nakamura et Anand, en m’étant au passage mélangé les pinceaux contre l’Espagnole ouverte de l’Indien. Duda m’ayant donné un point facile avec les noirs, j’ai fini le Rapide avec 6.5/9, soit un résultat parfait, et je pensais vraiment être en capacité de finir le travail très vite dans le Blitz. Je ne voyais pas trop ce qui pourrait m’arriver, et puis… il y a eu cette partie contre Grischuk !

Mvl-Grischuk, Paris Blitz, ronde 2.
Mvl-Grischuk, Paris Blitz, ronde 2.

Je me suis retrouvé dans cette position complètement gagnante avec en plus 3 minutes contre 10 secondes ! J’ai voulu m’appliquer pour ne pas faire n’importe quoi. Du coup, j’ai finassé, j’ai perdu un peu de temps, et dans la position suivante…

Mvl-Grischuk.
Mvl-Grischuk.

… j’ai renoncé à jouer le simple 28…Tf6 suivi du contre-sacrifice de qualité en e6, qui donne une finale avec deux pions de plus très facile à convertir. A la place, je me suis embarqué dans la manœuvre 28…Fc3 29.Th3 Fb4 30.Fd4 Fc5, qui ne gâche pas encore le gain, mais qui complique les choses après 31.Fg7 Tf2+ 32.Rd3. Et ici, j’ai joué l’incroyable 32…Te7??, mais Sacha n’a pas vu 33.Fg8+! Rxg8 34.h7+ qui forçait l’abandon !

Mvl-Grischuk.
Mvl-Grischuk.

Quelques coups plus tard, non seulement mon avantage avait déjà fondu comme neige au soleil, mais en plus j’ai à nouveau raté sa menace Fg8+! avec 41…Ff4??. Cette fois, Sacha n’a pas laissé passer l’occasion… (1-0, 49 cps). Le paradoxe, c’est que je suis sûr que j’aurais gagné cette partie si j’avais eu 20 secondes à la pendule au lieu de 3 minutes !

Une défaite difficile à avaler, et même si j’ai rebondi immédiatement contre Caruana, j’ai joué plusieurs parties erratiques par la suite. Pas celle contre Nakamura, qu’il a remportée proprement, mais les deux défaites contre Giri et Duda me viennent à l’esprit.

Bref, après ce score poussif de 50% le premier jour de Blitz, j’étais toujours seul en tête, et je pensais que j’allais retourner la situation le lendemain. Or, c’est allé de mal en pis ! J’ai traversé cette ultime journée comme un zombie, je n’arrivais plus à calculer une variante correctement. Je m’en suis rendu compte dès la troisième ronde contre Caruana…

Caruana-Mvl, Paris Blitz, ronde 12.
Caruana-Mvl, Paris Blitz, ronde 12.

Ici, je voulais jouer le normal 31…Da8 et la partie continue, puis je me suis ravisé : quel est le problème de 31…Fc7 ? Fabiano a répliqué 32.Dc2! et j’ai compris le problème, mais trop tard !

Duda-Mvl, Paris Blitz, ronde 17.
Duda-Mvl, Paris Blitz, ronde 17.

Autre exemple de mon état de forme en cette fin de tournoi : dans cette position égale, Duda a gaffé par 24.Cfe5??. Et je n’ai pas joué la réfutation 24…b5! parce qu’après 25.Fxb7, j’ai complètement oublié 25…bxc4 et les blancs perdent une pièce !. Sans commentaire… (1-0, 56 cps).

Je crois que je n’ai jamais aussi mal joué en blitz, et avec ce résultat global de 8/18, il est assez miraculeux que j’aie quand même pu conserver mon avance et remporter le tournoi au classement combiné. Les résultats sur les autres échiquiers ont tous tourné en ma faveur dans les dernières rondes !

Sur le plan comptable, j’ai fait une très bonne opération à Paris, et je pense être bien parti pour terminer dans les quatre premiers qui joueront la finale à Londres début décembre.

Grille du GCT 2019 après 3 tournois (www.grandchesstour.org).
Grille du GCT 2019 après 3 tournois (www.grandchesstour.org).

Prochaine étape pour moi, toujours le Grand Chess Tour, avec le Rapide & Blitz de Saint-Louis (USA), qui débute le 10 août, et qui sera immédiatement suivi de la Sinquefield Cup.

Retour en France le 31 août !

L’impasse

Maxime a décidé il y a quelques semaines de faire l’impasse sur le nouveau « Grand Swiss » imaginé par la FIDE, qui aura lieu en octobre sur l’Ile de Man, et qui offrira une place pour le Tournoi des Candidats au vainqueur. Il a considéré que ce tournoi était trop difficile et trop aléatoire pour lui consacrer deux semaines plus la préparation. Ayant évalué ses chances de l’emporter dans un tel tournoi Open à 5%, il a choisi d’y renoncer, et de consacrer son mois d’octobre à la préparation des échéances décisives du Grand Prix FIDE (en novembre à Hambourg et en décembre à Tel-Aviv).
Il y a parfois des décisions difficiles qui doivent être prises !

Les parties de Maxime à Zagreb (Site officiel):

Les parties de Maxime à Riga (Site officiel) :

Les parties de Maxime à Paris (Site officiel) :

Qualifications pour le championnat du monde 2020

Couverture

Comme vous l’indique son agenda, Maxime est entré dans une phase de rare intensité, à cause d’un calendrier international 2019 déséquilibré

Le prochain championnat du monde se déroulera en 2020, mais c’est dès maintenant que se jouent les qualifications. Dans les six derniers mois de l’année 2019, les top joueurs mondiaux vont enchaîner les tournois afin d’avoir une chance de défier Magnus Carlsen.

En mars 2020 se déroulera un tournoi double ronde à 8 joueurs, le « Tournoi des Candidats » ; le vainqueur affrontera Magnus Carlsen pour le titre mondial en novembre 2020. Le vice-champion du monde en titre, Fabiano Caruana, est déjà automatiquement qualifié, il reste donc 7 places à attribuer…

Trois compétitions permettront de qualifier 5 joueurs pour ce Tournoi des Candidats, tandis que les 2 autres places seront réservées sur d’autres critères.

1/ La Coupe du Monde : 2 places

2/ Le Grand Open FIDE : 1 place

3/ Le Grand Prix FIDE : 2 places

4/ Moyenne Elo 2019 : 1 place

5/ Wild-card : 1 place

A chaque étape du processus, il peut y avoir repêchage en cas de double qualification ; par exemple, si un joueur x remporte le Grand Open FIDE alors qu’il a fait 2e de la Coupe du Monde, alors, c’est le 2e du Grand Open FIDE qui prend la place qualificative.

Chacune des cinq modalités de qualification est spécifique, présentation détaillée. Cet article est largement inspiré de Wikipedia :

Wikipedia

1/ Coupe du monde d’échecs 2019

La Coupe du monde d’échecs 2019 est la dixième Coupe du monde d’échecs organisée sous l’égide de la Fédération internationale des échecs (Fide). C’est un tournoi d’échecs individuel par élimination directe à 128 participants qui sera joué entre le 10 septembre 2019 et le 4 octobre 2019 dans la ville russe de Khanty-Mansiïk.

Les deux finalistes du tournoi seront qualifiés pour le tournoi des candidats de 2020.

Format et Cadence

C’est un tournoi en 7 rondes à élimination directe.

Le format de chacun des matches est le suivant :

  • D’abord deux parties à la cadence classique de 90 minutes + 30 minutes après le 40ème coup, avec un incrément de 30 secondes à chaque coup à partir du premier coup.

En cas d’égalité 1-1, le même modèle est appliqué avec des temps qui se réduisent.

  • 25 minutes + 10 secondes/coup puis, si égalité 1-1,
  • 10 minutes + 10 secondes/coup puis, si égalité 1-1,
  • 5 minutes + 3 secondes/coup, puis, si égalité 1-1,
  • Et enfin une partie « armageddon » ou les Blancs reçoivent 5 minutes + 2 secondes/coup et les
  • Noirs 4 minutes + 2 secondes/coup, les Noirs l’emportant en cas de partie nulle.

La finale et le match pour la 3e place se disputeront en 4 parties classiques, avec le même déparatage que lors des tours précédents.

Participants

Les 128 participants sont choisis selon plusieurs modalités :

  • World Champion Magnus Carlsen ;
  • les quatre demi-finalistes de la Coupe du monde d’échecs 2017 (Levon Aronian, Ding Liren, Maxime Vachier-Lagrave et Wesley So) ;
  • la championne du monde Ju Wenjun ;
  • les deux champions du monde junior 2017 et 2018 (Aryan Tari et Parham Maghsoodloo) ;
  • 24 joueurs issus du Championnat d’Europe individuel 2018 ;
  • 22 joueurs issus du Championnat d’Europe Individuel 2019 ;
  • 20 joueurs des continents nord et sud-américains (issus des tournois zonaux et championnats continentaux 2018 et 2019) ;
  • 20 joueurs d’Asie et d’Océanie (issus des tournois zonaux et championnats continentaux 2018 et 2019) ;
  • 6 joueurs du continent africain ;
  • 18 joueurs ayant obtenu la meilleure moyenne Elo entre août 2018 et juillet 2019 et non qualifiés par les voies précédentes ;
  • 5 joueurs nommés par le Président de la Fide, dont la numéro un féminine, Hou Yifan ;
  • 4 joueurs nommés par le comité d’organisation local ;
  • un joueur qualifié lors de l’ACP Tour.
Prix
Classement Prix brut Somme des
prix par tour
Éliminé au 1er tour 6 000  384 000 
Éliminé au 2e tour 10 000  320 000 
Éliminé au 3e tour 16 000  256 000 
Éliminé au 4e tour 25 000  200 000 
Éliminé au 5e tour 35 000  140 000 
Quatrième place 50 000  110 000 
Troisième place 60 000 
Finaliste 80 000  190 000 
Vainqueur 110 000 
Fédération Internationale Des Echecs

2/ Le grand open fide :

Il se déroule du 10 au 21 octobre 2019 sur l’île de Man. 160 joueurs disputeront ce tournoi, et le vainqueur obtiendra sa place pour le Tournoi des Candidats.

105 sont sélectionnés par la FIDE sur la base des critères suivants :

Les 100 meilleurs Elo sur la moyenne des listes du 1er juillet 2018 au 1er juin 2019 inclus.

Les tenants des titres suivants au 1er juin 2019 :
Championne du monde
Champion du monde junior.
Champion du monde Senior
Champion du monde Vétéran.
Un qualifié provenant de l’ACP Tour

  1. 12 places sont allouées aux championnats continentaux 2019 : Europe – 5 Asia – 3 Americas – 3 Africa – 1
  2. 3 joueurs nommés par le Président de la FIDE.
  3. Les organisateurs choisiront alors 40 joueurs supplémentaires (wild cards), puisqu’ils souhaitaient avoir un plateau de 160 joueurs. Leur choix sera dirigé prioritairement vers des féminines, des juniors, des joueurs locaux, ainsi que des qualifiés via des tournois en ligne.

Le Grand Open FIDE se déroulera sur l’île de Man

3/ Le grand Prix Fide :

Participants

Participant à 3 sur quatre tournois, 21 joueurs sont retenus pour l’ensemble des quatre tournois en fonction de la moyenne de leur Elo entre février 2018 et janvier 2019. Sur ces 21 sélectionnés, cinq joueurs ayant choisi de ne pas participer au Grand Prix (le champion du monde Magnus Carlsen, le vice-champion Fabiano Caruana, Ding Liren, Viswanathan Anand et Vladimir Kramnik), quatre réservistes, choisis en fonction de leur Elo, ont été ajoutés. A ces 20 joueurs s’ajoute Daniil Dubov invité par l’organisation.

Joueur Fédération Mode de qualification
Shakhriyar Mamedyarov Azerbaïdjan Selon la moyenne
des classements Elo
entre février 2018
et janvier 2019
Maxime Vachier-Lagrave France
Anish Giri Pays-Bas
Wesley So États-Unis
Levon Aronian Arménie
Aleksandr Grichtchouk Russie
Hikaru Nakamura États-Unis
Sergeï Karjakine Russie
Yu Yangyi Chine
Ian Nepomniachtchi Russie
Peter Svidler Russie
Teimour Radjabov Azerbaïdjan
Veselin Topalov Bulgarie
Dmitri Jakovenko Russie
David Navara République tchèque
Radosław Wojtaszek Pologne liste complémentaire
Wei Yi Chine
Jan-Krzysztof Duda Pologne
Pentala Harikrishna Inde
Nikita Vitiugov Russie
Daniil Dubov Russie Sélectionné par
les organisateurs
À déterminer Participant au
tournoi de Tel-Aviv
Format et cadences

Chacun des quatre tournois est un tournoi à élimination directe.

Le format de chacun des matches est le suivant :

  • D’abord deux parties à la cadence classique de 90 minutes + 30 minutes après le 40ème coup, avec un incrément de 30 secondes à chaque coup à partir du premier coup.

En cas d’égalité 1-1, le même modèle est appliqué avec des temps qui se réduisent.

  • 25 minutes + 10 secondes/coup puis, si égalité 1-1,
  • 10 minutes + 10 secondes/coup puis, si égalité 1-1,
  • 5 minutes + 3 secondes/coup, puis, si égalité 1-1,
  • Et enfin une partie « armageddon » ou les Blancs reçoivent 5 minutes + 2 secondes/coup et les Noirs 4 minutes + 2 secondes/coup, les Noirs l’emportant en cas de partie nulle.
Prix et points « Grand Prix »

A l’issue des quatre tournois seront qualifiés pour le Tournoi des Candidats les deux joueurs ayant cumulé le plus de points « Grand Prix ». Pour chaque tournoi, les points « Grand Prix » sont attribués selon le formule suivante :

Phase Nombre de joueurs Points Grand Prix Prix emportés
Gagnant 1 8 24 000 dollars
Finaliste 1 5 14 000 dollars
Demi-finaliste 2 3 10 000 dollars
Quart-finaliste 4 1 8 000 dollars
Huitième-finaliste 8 0 5 000 dollars

Chaque match gagné sans départage apporte 1 point supplémentaire.

Logo Grand Prix FIDE
Logo Grand Prix FIDE

Enfin, si on ne réussit pas à se qualifier via ces trois tournois, il restera encore deux possibilités :

4/ Moyenne Elo 2019 :

Le joueur possédant la meilleure moyenne Elo sur les 12 listes allant du 1er février 2019 au 1er janvier 2020 prendra la 7e place qualificative pour le Tournoi des Candidats. Vu l’avance qu’il possède à mi-chemin, on voit mal comment cette place pourrait échapper à l’actuel n°3 mondial, Ding Liren. Si le Chinois se qualifie par un autre biais, la lutte sera rude pour la 4e place, entre Giri (2789,3 après 6 listes/12) et Mamedyarov (2782,2). Mvl est le suivant sur la liste, même s’il paraît bien loin (2777).

5/ Wild-card :

L’organisateur du Tournoi des Candidats aura le privilège de nommer directement le 8e et dernier participant, mais contrairement aux éditions précédentes, il devra néanmoins faire son choix parmi un nombre limité de joueurs. La règle est la suivante :

Le nominé devra avoir disputé au moins deux des trois compétitions qualificatives.

Il devra également être :

  • Soit le premier non-qualifié d’une des trois compétitions qualificatives
  • Soit un membre du Top 10 mondial sur la moyenne Elo 2019

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